Les paramètres physiologiques de la performance en course à pied
Découvre les principaux déterminants physiologiques de la performance en course à pied : VO₂max, seuils, économie de course et durabilité.
Jonas Darbellay
10/28/20255 min read
Les paramètres physiologiques de la performance en course à pied
Une performance en course à pied résulte d’un ensemble de très nombreux facteurs physiques, psychologiques ou encore nutritionnels, parmi lesquels, on retrouve :
• ton niveau d’endurance,
• la gestion du volume et des intensités d’entraînement,
• des aspects psychologiques (gestion du stress, motivation),
• une bonne stratégie nutritionnelle avant, pendant et après la course,
• une récupération adaptée,
• etc.
Sur un plan strictement physiologique, trois paramètres majeurs influencent la performance en course à pied :
La VO₂max
La fraction d’utilisation de la VO₂max
Le coût énergétique
Ces trois piliers tentent, depuis plusieurs décennies, de décrire les performances observées entre athlètes. Toutefois, les recherches récentes soulignent qu’un quatrième facteur, la durabilité, complète désormais ce modèle.
La VO₂max
La VO₂max représente la quantité maximale d’oxygène que ton organisme peut utiliser pendant un effort.
C’est un très bon indicateur de la capacité aérobie d’une personne. Elle s’exprime en millilitres d’oxygène consommé par minute et par kilogramme de poids corporel (ml/min/kg).
Si l’on te compare à une voiture, la VO₂max correspond à la puissance du moteur : plus le moteur est puissant, plus la voiture peut aller vite.
En endurance, plus ta VO₂max est élevée, plus ton niveau aérobie potentiel est important.
De nombreux paramètres déterminent ta VO₂max, dont notamment :
• l’âge,
• le sexe,
• les entraînements,
• le poids corporel,
• l’altitude,
• la génétique, etc.
Notre capacité d’amélioration de la VO₂max reste plutôt limitée : on estime un gain possible de 15 à 25 % avec un entraînement adapté.
Au plus haut niveau, les élites présentent des VO₂max très proches (entre 80 et 85 ml/min/kg), ce qui explique pourquoi la différence de performance se joue ailleurs.
La fraction d’utilisation de la VO₂max
S’il est important d’avoir une VO₂max élevée, il est tout aussi crucial de pouvoir maintenir un pourcentage élevé de cette VO₂max le plus longtemps possible.
Autrement dit, plus tes seuils sont hauts, plus tu peux courir vite, longtemps.
Exemple concret :
Arnaud et Amélie ont la même VMA (17 km/h) et la même VO₂max (60 ml/min/kg).
Cependant, Amélie présente un deuxième seuil à 15 km/h, contre 14 km/h pour Arnaud.
À VO₂max égale, Amélie est donc capable de soutenir une vitesse plus élevée plus longtemps : elle devrait normalement courir plus vite sur 10 km, semi ou marathon.
Au haut niveau, la plupart des athlètes d’élite présentent une fraction d’utilisation très élevée, rendant ce facteur discriminant surtout chez les athlètes intermédiaires.
Le coût énergétique (économie de course)
Le coût énergétique correspond à la quantité d’énergie nécessaire pour se déplacer à une vitesse donnée. Plus il est faible, plus tu es économe et efficace.
Si l’on reprend l’exemple de la voiture, il s’agit de ta consommation d’essence aux 100 km : moins tu consommes d’essence à une vitesse donnée, plus tu es économe et tu peux « préserver ton énergie ».
Exemple :
Amélie court à 15 km/h pour une consommation d’oxygène de 50 ml/min/kg.
En améliorant son économie de course, elle peut atteindre la même vitesse avec une consommation réduite à 45 ml/min/kg.
Résultat : moins d’énergie dépensée pour le même effort, donc plus de performance.
Le cycle étirement-raccourcissement (CER) joue un rôle clé.
Ce mécanisme permet aux muscles et tendons de stocker et restituer de l’énergie élastique, améliorant la force produite sans surcoût énergétique.
Un bon CER réduit le temps de contact au sol et améliore l’efficacité mécanique.
Pour améliorer le coût énergétique, diverses méthodes sont utilisées :
• augmentation progressive du volume d’entraînement,
• travail de renforcement musculaire ciblé sur les membres inférieurs,
• exercices pliométriques pour renforcer le cycle étirement-raccourcissement.
Au plus haut niveau, les différences de performance peuvent notamment se jouer ici : à VO₂max et fraction d’utilisation équivalentes, l’athlète le plus économe énergétiquement peut être le plus performant.
À noter que l’arrivée des chaussures à plaque carbone illustre parfaitement cette recherche d’économie. Ces chaussures ont été développées avec pour objectif d'optimiser ce coût énergétique.
Et qu’en est-il de la durabilité ?
Longtemps, la performance en endurance a été décrite à travers le triptyque classique : VO₂max – fraction d’utilisation – coût énergétique.
Cependant, ces trois variables ne suffisent pas à expliquer pourquoi deux athlètes au profil physiologique similaire peuvent avoir des performances différentes sur de longues durées.
C’est ici qu’intervient la notion de durabilité (durability), un concept récemment mis en avant dans la littérature scientifique (Maunder, Jones, Hunter, 2021–2025).
Définition :
La durabilité désigne la capacité à maintenir ses qualités physiologiques et mécaniques au fil du temps, malgré la fatigue induite par l’effort prolongé.
Autrement dit : combien de temps peux-tu préserver ton « moteur » avant qu’il ne s’altère ?
Concrètement :
Deux athlètes peuvent avoir quasiment la même VO₂max, la même économie de course et les mêmes seuils, mais :
• chez l’un, ces variables physiologiques chutent fortement après 90 minutes d’effort,
• chez l’autre, elles restent relativement stables.
C’est ce dernier qui est plus « durable » et donc plus performant sur le long terme.
Les recherches montrent que cette résistance à la fatigue varie considérablement entre individus et qu’elle dépend de plusieurs facteurs, dont :
• la robustesse métabolique,
• la tolérance neuromusculaire à la fatigue,
• la stabilité de la foulée et de l’économie de course,
• la gestion nutritionnelle et hydrique pendant l’effort,
• etc.
En pratique :
Travailler sa durabilité consiste à retarder la dégradation des paramètres physiologiques avec la durée. Cela passe notamment par :
• un volume d’entraînement relativement important,
• des sorties longues comprenant notamment des allures de course,
• des blocs de charge accumulée simulant la fatigue de course,
• une optimisation nutritionnelle (disponibilité énergétique, stratégie glucidique),
• un renforcement de la résilience mentale,
• etc.
En résumé :
La durabilité, c’est ta capacité à rester « performant·e » quand la fatigue s’installe.
C’est le quatrième pilier de la performance en endurance, celui qui relie la physiologie à la réalité de la course.
Différences entre course à plat et trail
Si ces paramètres s’appliquent pleinement à la course sur route et aux distances jusqu’au marathon, ils doivent être nuancés en trail. Le trail comporte une forte composante concentrique en montée et excentrique en descente, le rendant moins pliométrique que la course sur route.
Le cycle étirement-raccourcissement y joue donc un rôle plus limité.
De plus, la VO₂max perd de son importance dans les épreuves d’ultra-endurance.
Sur ces durées, l’athlète ne tourne plus à plein régime : la performance dépend davantage d’un premier seuil élevé et de facteurs non physiologiques comme la gestion mentale, la stratégie nutritionnelle ou la tolérance à la fatigue prolongée…
Raison pour laquelle, en ultra-endurance, les femmes peuvent même surpasser les hommes 😉
Références :
Bassett, D. R., & Howley, E. T. (2000). Limiting factors for maximum oxygen uptake and determinants of endurance performance. Medicine & Science in Sports & Exercise, 32(1), 70–84.
Coyle, E. F. (1995). Integration of the physiological factors determining endurance performance ability. Exercise and Sport Sciences Reviews, 23(1), 25–63.
Saunders, P. U., Pyne, D. B., Telford, R. D., & Hawley, J. A. (2004). Factors affecting running economy in trained distance runners. Sports Medicine, 34(7), 465–485.
Maunder, C. D., Seiler, S., & Jones, A. M. (2021). The importance of ‘durability’ in the physiological profiling of endurance athletes. European Journal of Applied Physiology, 121(9), 2871–2886.
Hunter, B., Maunder, E., Jones, A. M., Gallo, G., & Muniz-Pumares, D. (2025). Durability as an index of endurance exercise performance: Methodological considerations. Experimental Physiology.
Millet, G. P. (2017). Pratiques innovantes en entraînement et réentraînement. ISSUL – Université de Lausanne





